«Autant d’images brouillées, confondues – autant de traces sur le papier.»
À la limite du visible et de l’invisible, j’élabore d’une façon fantomatique une construction imaginaire, J’ébauche la forme, je cherche les mots, je trace le signe d’une inscription fragile. J’évente la mémoire – dans la nuit noire sans carte et sans boussole je traverse, je perce et je trace le sillon, je démêle, je rectifie, j’extrais de la matière de petits bouts de temps.
Je voudrais remonter à l’enfance, celle qui remonte à plusieurs milliards d’années, celle qui nous dépasse et nous constitue. Je voudrais dire l’état sauvage, brut et violent – le premier souvenir.
Un jour je saurai le sens caché. Un jour, je saurai la texture, l’agencement, la trame obscure du tout. Un jour, je saurai le pourquoi aveugle du comment. Un jour, je saurais le dedans du partout et le futur antérieur du passé.
Ces images sont la matière mentale de ma digestion de l’espace. Je voudrais fixer la texture du temps espace.
…et je sais le plaisir sans équivoque, vertigineux de laisser des traces. Les images cachent des images, demain encore d’autres formes naîtront.